Arts

L'outreligne

Milton Becerra et Pancho Quilici

24 mai 2023 22 juil 2023

La Maison de l’Amérique latine présente deux artistes vénézuéliens, Milton Becerra (né dans l’état de Táchira, en 1951) et Pancho Quilici (né à Caracas, en 1954).

 

Sous le commissariat de Christine Frérot, les visiteurs pourront mesurer comment avec ces «passeurs de temps», la ligne défie et franchit les horizons, culturels, historiques, naturels, géométriques et constructifs, en toute liberté, avec raison et déraison.

Arrivés en France au début des années 1980, où ils vivent et travaillent depuis lors, les deux jeunes artistes vénézuéliens, imprégnés à des degrés divers de l’esthétique cinétique de leurs aînés, vont très tôt se défaire de cette séduction passagère pour trouver une voie qui leur est propre. Chez eux, géométrie et nature se fondent dans un complexe et savant réseau de lignes, de trames et de formes, leurs « syntaxes » innovantes entrent en résonance et se confondent dans leurs utopies cosmogoniques et chamaniques. Dans sa quête revendiquée de questionnements à la fois existentiels et formels, chacun s’attache aussi à définir la place déterminante qu’ont, autant dans sa réflexion que dans l’expérimentation, les références mathématiques et scientifiques. Le temps, ce « temps sans durée » dont parle l’écrivain Philippe Curval à propos de Quilici, est au cœur de la gestation de l’œuvre, conforté par ces vertus que partagent les deux artistes, la lenteur, la patience et la persévérance.

 

La cohabitation muséographique de leurs œuvres doit sembler fluide et cohérente et induire une communauté de pensée dans laquelle le « tressage » de Becerra répond au « maillage » de Quilici et réciproquement.

 

 

« On peut alors se demander ce qu’ont en commun Pancho Quilici et Milton Becerra en dehors de ce qui, à première vue seulement, peut les opposer ? Qu’est-ce qui les rapproche ? Que partagent-ils ? On observe d’abord combien le plus célèbre héritage artistique de leur pays, le cinétisme, imprègne à des degrés divers leur complexe univers de lignes et leurs élaborations de trames et de formes, dans lesquels géométrie et nature se confondent. Dans sa quête revendiquée de questionnements à la fois existentiels et formels, chacun s’attache aussi à définir la place déterminante qu’ont, dans sa réflexion, les références mathématiques et scientifiques. Par ailleurs, l’apesanteur, où s’affirme leur commun désir d’espace, est déterminante dans leur approche conceptuelle, artistique et sensible ; quant au rôle joué par le temps, ce « temps sans durée » dont parle l’écrivain Philippe Curval à propos de Quilici, il est au coeur de la gestation de l’oeuvre, conforté par ces vertus que partagent les deux artistes, la lenteur, la patience et la persévérance.


Si l’on se penche sur la manière qu’a chacun d’imaginer sa géométrie et de construire sa propre « aventure de lignes », comme l’écrit Henri Michaux à propos de Paul Klee, on réalise combien ce défi au vide est pensé en amont et irrigue leurs discours culturel imprégné d’une réflexion nourrie de curiosités et de connaissances de nature scientifique. Les présenter ensemble, c’était donc, à travers un dialogue scénographique inédit, tenter de trouver une visibilité à leur communauté d’idées, pour construire une éventuelle troisième voie, celle proposée au premier étage de la Maison d’Amérique latine dans une installation pensée et réalisée en commun, à ma demande, par les deux artistes pour cette exposition. »

 

« Qu’il serpente dans la géométrie contrôlée de Quilici et la précision mathématique – autant cartésienne qu’audacieuse - de ses tracés, ou qu’il se matérialise chez Becerra dans une intervention qui invoque la tradition ou la mémoire indigène, à la croisée du land art et de l’Arte povera – sans qu’il prétende pour autant appartenir à aucun de ces mouvements -, leur lien avec la « nature », par la médiation de la ligne, est indéfectible. Autant la démarche de Becerra est pensée dans sa relation à l’homme et l’évoque en permanence dans sa « géométrie habitée », autant Quilici, dont l’art est dépouillé de toute référence proprement humaine, propose une « lointaine proximité », comme il la définit, avec la logique abstraite et/ou scientifique de l’espace-temps, celle de « la matrice minérale » (Edouard Glissant) du monde. Et puis, de Milton à Pancho, il y a les pierres, les cordes et les fils, la ligne toute puissante comme point de départ de la recréation incessante des origines, de sa dimension mythologique, matérielle et palpable, à celle plus évanescente d’un entrelacs de traits et de constellations, où la géométrie, en filigrane, tisse un cosmos de fiction.»

 

Extraits du catalogue

Texte de Christine Frérot 

 

 

 

Biographie

Milton Becerra est né à Táchira, au Venezuela, en 1951. Artiste sculpteur multidisciplinaire, il est diplômé de l’École des Beaux-Arts de Caracas et vit et travaille désormais à Paris et Miami

 

Sélection d’expositions personnelles

1991 : Installation Gotas, galería Espacio Fénix de Caracas, Venezuela.

2000 : L’esprit des liens, IUFM Confluence(s) Lyon, France.

2008-2009 : Maleiwa, Centro de Arte Lía Bermúdez, Maracaibo, Venezuela.

2008-2009 : Maleiwa, Centro de Arte Lía Bermúdez, Maracaibo, Venezuela.

2012 : Wale’keru, MultipleSpacings, PROGR, Centre de production culturelle, Berne, Suisse.

2016 : Irradiación de la energía, Espacio Cultural El Tanque, Tenerife, Îles Canaries, Espagne.

2018 : Sinfonía del Universo, Museo de Arte Contemporáneo MAC, Lima, Pérou.

2023 : Hexagonometria, The TransArt Foundation, Houston, Texas, États-Unis.

 

Sélection d’expositions collectives

2001 : Territorios Insulares, Galerie nationale, Palais Royal, Budapest Hongrie.

2011 : Identity, Hardcore Art Contemporary Space, Miami, Floride.

2012 : Á part, Festival international d’art contemporain, Les Alpilles, Francia.

2017 : Cuatro Décadas Arte Latino Americano, Art Nexus Foundation, Miami, Floride.

2019 : Postales de futuro, Baró House, Madrid, Espagne ; Concretismo y Abstracción, Art Nouveau Gallery, Miami, Floride

 

 

Pancho Quilici est né à Caracas en 1954. Diplômé de l’Instituto de Diseño de Caracas au Venezuela, il vit et travaille à Arcueil. 

 

Il est représenté à Paris par la Galerie Wagner où il expose actuellement jusqu'au 10 juin :  Ex situ.

Plus d'information : www.galeriewagner.com

 

Sélection d’expositions personnelles

1979 : Galerie Minotauro, Caracas,Venezuela.

1980 : FIAC, Grand Palais, Galerie du Dragon, Paris ; Galerie Minautoro, Caracas.

1983 et 1985 : International Art Fair, Galerie Minotauro, Chicago, Etats-Unis ; FIAC, Grand Palais, Paris.

1987 : Museo de Bellas Artes, Caracas.

1990 : Théâtre du Vieux Colombier, Paris.

2001 : ARCO, Galerie Thessa Herold, Madrid.

2004 : Pancho Quilici : Recent works, Galerie Maya Polsky, Chicago.

2007 : En trajectoires, Galerie Thessa Herold, Paris.

2013 : Galeria D’Museo, Caracas ; Galerie Thessa Herold, Paris (avec la parution du livre «Pancho Quilici, d’un oeil inquiet »).

2019 : Galerie Wagner, Le Touquet France.

 

Sélection d’expositions collectives

1983 : L’Amérique latine à Paris, Droits Socialistes de L’Homme, Grand Palais, Paris.

1986 : Los Americanos, Artcurial, Paris ; Musée de l’Amérique Latine, Monaco.

1990 : Mages, magies, Présences Contemporaines, Aix-en-Provence, France.

1999 : Jules Verne : les mondes inventés, Bibliothèque Municipale, Nantes, France.

2011 : Convergences con José Gamarra, Ramón Alejandro, Atelier Morales, Pancho Quilici, Miami Biennale, Miami.

2015 : Fondation Villa Datris, Archi-sculpture, L’Isle sur la Sorgue France.