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La fin des inégalités en Amérique latine ?

L’urgence de réformes fiscales progressives

15 mars 2023 à 19h

L’ICRICT, la Commission indépendante pour la réforme de la fiscalité internationale des entreprises est un groupe de personnalités de haut niveau – Thomas Piketty et Joseph Stiglitz en font notamment partie – engagé pour réformer le système fiscal international afin qu’il soit plus juste et plus inclusif.

De passage à Paris, ses experts se proposent d’expliquer pourquoi l’Amérique latine a une chance inédite de s’attaquer aux inégalités records en mettant en place des réformes fiscales progressives, notamment pour que les multinationales les plus rentables et les plus riches payent leur juste part d’impôts.

Intervenants :

♦ Alain Rouquié, Président de la Maison de l’Amérique latine, introduira la conférence en revenant sur les enjeux pour la démocratie dans la région

♦ Edmund Fitzgerald, Professeur émérite à St Antony's College, à Oxford, et membre de l’ICRICT

♦ Ricardo Martner, économiste, ex-chef du département fiscal de la CEPAL (Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes) et membre de l’ICRICT

♦ Luis Fernando Medina Sierra, représentant permanent de la Colombie auprès de l'OCDE

♦ Magdalena Sepúlveda, avocate spécialiste des droits de l’homme, directrice exécutive de l'Initiative mondiale pour les droits économiques, sociaux et culturels (GI-ESCR) et membre de l’ICRICT.

Débat modéré par Susana Ruiz, responsable du plaidoyer justice fiscale pour Oxfam International. Les intervenants s’exprimeront en français ou en espagnol.

Pour l’Amérique latine, la pandémie de Covid 19 et les effets de la guerre en Ukraine ont accentué une crise des inégalités déjà fortement installée dans la région comme en témoignent les tensions sociales de ces dernières années. Un tiers de la population latino-américaine est aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, et 13 % sont dans une situation d'extrême pauvreté - les enfants, les femmes, les populations indigènes et les descendants d'Africains en sont les principales victimes. Pour la Cepal, il s’agit d’un retour d’un quart de siècle en arrière.

 

Dans le même temps, les inégalités explosent. Depuis le début de la pandémie, la richesse des plus riches a augmenté de 21%, un taux de croissance cinq fois supérieur à celui du PIB régional d’après Oxfam. Cent d'entre eux possèdent désormais plus de richesses que 392 millions de personnes, soit 60 % de la population de la région.

 

Ne pas répondre à l'urgence sociale, c'est prendre le risque d'alimenter l'instabilité politique et la violence, et de saper la crédibilité des institutions démocratiques dans une région déjà marquée par les tentations autoritaires. Comment, alors, financer des programmes sociaux, des infrastructures, relancer l'emploi, améliorer la qualité des services publics et relever les défis du changement climatique sans augmenter le déficit et, par conséquent, la dette ? Opter pour l'austérité, l’histoire l’a montré, revient avant tout à fragiliser encore les services publics déjà fragilisés et à creuser les inégalités déjà fortes.

 

Il existe des alternatives. Les États peuvent faire le choix de réformes fiscales courageuses visant à augmenter leurs ressources fiscales en faisant contribuer les grandes entreprises et les particuliers les plus riches. Les couches les plus défavorisées paient en effet relativement plus d'impôts que les plus riches, qui sont aussi les champions de l'évasion fiscale – elle coûte à la région l'équivalent de 6,1 % du PIB chaque année.

 

La Colombie et le Chili ont déjà décidé de mettre en œuvre des réformes fiscales progressives, et le Brésil de Lula semble vouloir en faire de même. Le premier sommet fiscal d'Amérique latine et des Caraïbes sera d’ailleurs organisé en juillet à Cartagena, pour parvenir à une meilleure coordination entre les capitales de la région. Une initiative historique dont les enjeux seront expliqués durant la conférence.