Philosophie

La république universelle

Les chemins aporétiques de la liberté

26 oct 27 oct 2020

Colloque international dans le cadre de la Semaine de l'Amérique latine

A l’injonction de Victor Hugo : « Ô République universelle. Tu n’es encore que l’étincelle. Demain tu seras le soleil » (Lux) répond comme en écho l’imaginaire de la Commune de Paris en 1871: que cette république universelle soit démocratique et sociale. Les paroles et les actions de la pensée communarde nomment ainsi la distance qui la sépare de la révolution bourgeoise de 89, et sa défiance à l’égard des institutions de l’Etat et des frontières de la Nation. Kristin Ross identifie trois évènements qui signent l’après-coup de l’insurrection: l’incendie de la guillotine sur la place Voltaire le 10 avril 1871, la destruction, le 16 mai, de la colonne Vendôme, édifiée à la gloire des conquêtes impériales napoléoniennes, et la création le 11 avril de l’Union des femmes. Que la république « réelle » - la IIIe  République – s’instaure dans le violent déni de cet après coup prend alors tout son sens politique réactif.       

 

Cent cinquante ans plus tard, d’autres situations font advenir un désir de communauté et d’égalité à l’écart du système d’institutions gouvernementales et publiques instituées, revendiquant pour une communauté de luttes d’être en même temps une communauté de vie : comme si la tension entre être ensemble pour inventer des institutions et des formes de vie autonomes pouvait se conjoindre avec une lutte (des classes, des femmes, …) contre la domination politique et économique… Occuper les rues et les places, d’Athènes à Santiago du Chili, en passant par Alger, Mexico ou Paris, plutôt que les usines ou les universités ? Apories de la liberté ? 

 

Dans un monde qui sectorise, disjoint, sépare et institue partout la concurrence, comment faire du commun avec du non-commun ? La question de la liberté aujourd’hui est moins celle de la transformation des modèles critiques en une pensée molle visant à vérifier la domination ou à se résigner à son caractère inéluctable, que celle des expériences et des usages intempestifs de la liberté qui créent des situations inattendues où des êtres parlants se mettent à parler et à agir autrement que ce que l’on attend d’eux, sur un fond de subjectivations égalitaires. Qu’est-ce qui, dans les situations d’obscurcissement qui président aux pseudo-consensus visés par les incessantes salves de réformes des républiques  libérales, devient visible grâce aux capacités de résistances du grand nombre au nom de la liberté et sous condition de la revendication de l’égalité ? Se lever et se casser ? El que baila, pasa ? Mettre à brûler ce qui doit l’être ?

 

Cela suppose en tous cas la tâche philosophique de reconfigurer les horizons d’universalité dont peuvent se soutenir les visées contemporaines de savoirs et d’actions en leur faisant traverser l’épreuve de toutes les asymétries, hétérotopies, hétérogénéités, qu’un universalisme hérité et compromis dans des aventures théoriques et pratiques devenues indéfendables avait rouvertes et maintenues dans un impensé : les apories de la liberté.

 

Patrice Vermeren, Université de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis.

 

Organisé par le Laboratoire d’études et de recherches sur les logiques contemporaines de la philosophie de l’Université Paris 8 (LLCP), le Laboratoire du changement social et politique de l’Université Paris 7 (LCSP), l’Institut des Hautes Études Latino-américaines de l’Université Paris 3 (IHEAL), le Centre de recherche sur l'action locale (CERAL) de l’Université Paris 13, la Red Internacional Pensamiento Crítico (RIPC), le Département de Philosophie de l’Université Autonome de Barcelone (Equipe de recherche : Justice et Démocratie : vers un nouveau modèle de solidarité, financée par le Ministère de l’Economie et Compétitivité de l’Espagne et la Chaire de philosophie contemporaine de l’Université de Barcelone), le Grecol-AL et la Fondation Maison des Sciences de l’Homme (FMSH) dans le cadre de la Semaine de l’Amérique Latine et des Caraïbes à Paris, avec le soutien de l’Institut des Amériques et l’Université Paris Lumières (ComUE), avec la coopération de la Universidad de la República (Uruguay), Universidad de Chile, Universidad de Los Lagos, Universidad de Buenos Aires, Universitat Autònoma de Barcelona, Universidad de Valparaiso,  Universidad de Playa Ancha et Universidad Austral (Valdivia) et le Séminaire Les Dialogues Philosophiques de la Maison de l’Amérique latine.

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Le colloque se poursuivra le 28 octobre à l'Université Paris 7.

Inscriptions https://cutt.ly/Colloque_28